lundi 29 avril 2013

Le doigt pointé vers la lune



Beaucoup de gens supposent qu'ils doivent se transformer, devenir quelque chose d'autre, soit un saint ou un sage. N'est-ce pas une grande erreur et même une grande absurdité ? Celui qui pense ainsi n'est lui-même qu'un phénomène dans un rêve. Il n'est qu'un personnage dans une pièce de théâtre ou une manifestation assujettie au conditionnement appelé « le karma ». Cette manifestation ou ce personnage de rêve seront obligés de vivre leur rêve, de jouer leur rôle dans le drame et de subir leur « karma » jusqu'à la fin. L'ego qu'ils croient vouloir détruire, et qui semble les tourmenter et les maintenir dans une servitude imaginaire est une part inévitable et nécessaire de leur personnalité de rêve, de leur rôle, de leur « karma ». Ils ne pourraient pas « sembler » exister sans cet ego. Sa disparition serait la dé-phénoménalisation et elle sera le résultat d'un éveil hors du rêve. La disparition de l'ego n'est jamais un moyen pour arriver à l'Eveil. Le moyen « d'éveiller » hors du rêve réside simplement dans la compréhension de ce que nous sommes. Nous ne sommes pas l'apparence, le personnage de rêve, ni son rôle, ni la marionnette assujettie au « karma ».
Jamais nous ne pourrons nous éveiller hors du rêve en perfectionnant notre « moi » supposé. Nous réaliserons l'Eveil par la reconnaissance de notre « identité » véritable comme la source du rêve, du drame, de la manifestation phénoménale.
Note :
Un « Je » n’est qu’un concept qui s’arroge toutes les impulsions qui se présentent comme des « mois ». Celui qui pense du point de vue de l’entité qu’il se croit être, n’a pas encore commencé à comprendre de quoi il s’agit.
Ceci est d’autant plus évident, si nous essayons de travailler sur nous-même en ayant présente à l’esprit la notion d’entité. Elle n’est qu’un concept du mental et tout ce que nous faisons avec cette notion fausse, par cette notion fausse et pour cette notion fausse est vain.



Il n'y a ni « libre-volonté » ni « prédestination », car il n'existe aucun moi individuel pour voir l'une ou l'autre. Il n'y a qu'un objet dont chaque action est nécessairement prédéterminée, une marionnette somatique qui est « vécue » depuis l'intégration physique jusqu'à la désintégration physique. L'élément psychique de cet appareil psychosomatique est l'intermédiaire par lequel l'appareil total est « vécu ». Par lui les impératifs nécessaires sont traduits en actions, soit conscientes soit inconscientes, apparemment délibérées ou purement végétatives.
Ce n'est que sous la domination d'un concept d'égocentrisme que la psyché développe la volition, laquelle assume l'indépendance apparente d'action appelée « libre-volonté ». Chaque fois qu'elle diffère de l'action inévitable et correcte qui résulte des causes dans un contexte temporel, « passé » ou « futur », elle se débat désespérément pour réaliser un désir personnel en dépit de la loi de cause et effet. Mais jamais ce geste futile n'apporterait quoique ce soit qui ne fut pas dicté par la force inexorable de circonstances, ni éviterait quoique ce soit qui le fut.
C'est précisément en cela que consiste le conflit et le conflit est la souffrance, tandis que l'absence de cette pseudo-volition est la plénitude sereine de la vie éveillée ou nouménale.
L'illusion de la « libre-volonté » soutient l'illusion d'un « ego » ou d'un « soi », et réciproquement la notion de volition cherchant la réalisation d'un désir, crée la notion d'un « ego » ou d'un « soi », dont la « volonté » doit être exécutée. Par contre on doit conclure que la désagrégation, puis l'anéantissement de la notion de l'efficacité de la volition résultera inévitablement dans la désagrégation et l'anéantissement de la notion du « soi » ou de l' « ego » à laquelle il doit son existence illusoire. La désagrégation de la notion de volition se réalise par la reconnaissance qu'il ne peut être qu'une futile démonstration d'impuissance (sauf quand il coïncide avec l'action qui est en accord avec la force de circonstances).
Il n'y a ni libre-volonté ni prédestination, soit phénoménalement soit nouménalement, car dans aucun des deux aspects-d'être ne se trouve d'entité qui pourrait exercer l'une ou être assujettie à l'autre.




Wu Wei - le non agir

 

L'éveil consiste donc à amener ce processus à un arrêt brusque en cessant de regarder dans la mauvaise direction.
L'éveil n'est pas atteinte de quoi que ce soit : il n'est que l'élimination d'une barrière, celle du concept du je-sujet, qui le fait inévitablement apparaître comme éveil de moi-même - au lieu de ceci-qui-est lorsque je ne suis pas.
Il y a le « je » apparent, et le « non-Je » qui est l'absence même de moi - ce qui est (est appelé) Eveil, tout comme l'absence d' « éveil » est précisément la présence apparente de moi. Ils sont le côté pile et face d'une pièce - une dualité, non un dualisme.
Un Bodhisattva ne cherche pas à éveiller l'inexistence d' « autrui » : inexistant en tant que « soi », ce qu'il « est » détruit l'illusion de l' « existence d'autrui » en tant que tel.
Le Satori n'a pas d'existence objective
Rien de tel que l'éveil ou le satori n'existe en tant que fait objectif ou événement hors du temps. Rien d'autre ne se produit dans le mental que l'éclipse du je-notion qui entravait la vision. On ne peut donc ni les étudier ni les rechercher. Toute action semblable reviendrait à accomplir un acte chirurgical sur une image.
Rien ne se produit sur quoi que ce soit, rien n'est changé ; il n'y a nul événement psychosomatique ; le mental n'est pas affecté. Ce n'est que rétablissement d'une vision claire. Cela n'a pas d'existence objective : c'est une rectification purement subjective.
 
Wu Wei Wei

       

vendredi 26 avril 2013

La fleur et le papillon




                                                
                                                 

 
 
La fleur invite le papillon, sans pensées
Le papillon visite la fleur, sans pensées
La fleur s'ouvre, le papillon vient
Le papillon vient, la fleur s'ouvre.
 
Je ne connais pas les autres
Les autres ne me connaissent pas.
 
Ne sachant rien,
Nous comprenons le cours de la nature
 
Riokan, Maître Zen


Des Yogis et des hommes



            



Il y en a qui yamaniyamisent du matin au soir et il y en a qui se fichent des yama-niyama.

Il y en a qui occupent une heure de yoga avec trois postures et il y en a qui enchaînent soixante postures à la demi-heure.

Il y en a qui inspirent de bas en haut et il y en a qui inspirent de haut en bas.

Il y en a qui se dopent au kapâlabhâti et il y en a qui, au bout de cinq respirations, prennent un air de héros fatigué.

Il y en a qui méditent à l’aube, d’autres le soir, certains tournés vers l’est, certains tournés vers eux-mêmes, et d’autres qui ne méditent pas du tout, et d’autres qui croient méditer.

Il y en a qui s’ennuient en méditant et il y en a qui ne savent pas qu’ils s’ennuient en méditant.

Il y en a qui beuglent des mantras, d’autres qui bricolent dans le tantra, d’autres qui dessinent des yantras, et d’autres qui confondent mantras, tantra et yantras.

Il y en a qui savent le sanskrit, d’autres qui font croire qu’ils savent le sanskrit et d’autres qui s’imaginent qu’en Inde tout le monde parle sanskrit.

Il y en a qui sont allés en Inde, je veux dire dans un ashram en Inde, et d’autres qui ont peur d’aller en Inde, des fois que l’Inde ne ressemble pas à l’Inde.

Il y a des gouroulogues, des gourouphones, des gourouphiles, des gouroulâtres, des gouroulacariâtres, des gouroumaniaques, des gourouphobes, des gouroupathes, des gouroucides, des gourouphages, et il y aurait même encore quelques gourous.

Il y en a qui ont lu les Yoga-sûtra et qui regardent de haut ceux qui n’ont pas lu les Yoga-sûtra. Il y en a qui font semblant d’avoir lu les Yoga-sûtra, d’autres qui en ont lu un résumé. Et il y en a qui les confondent avec les Kâma-sûtra.

Il y en a qui sont pour les écoles — écoles du nord, écoles du Sud, écoles du Nord-ouest, du Sud-sud-ouest, Cachemire du XIIe siècle, Bihar du XIVe, tantrisme sikh, jaïnisme de la Main gauche… — et d’autres qui sont contre les écoles (à bas les systèmes, vive la spontanéité !) et d’autres qui disent que toutes les écoles se valent, tout est dans tout n’est-ce pas, et ceux qui changent d’école tous les deux ans et ceux qui ne supportent pas qu’on change d’école.

Il y en a qui ont six chakras, dont trois ouverts, et d’autres sept, quatorze ou soixante-quatre, et tous ouverts, ou bien alternativement, et puis qui peuvent ouvrir les chakras fermés des autres, ou bien fermer leurs chakras ouverts, attention pas de fausse manœuvre. Et puis il y a les malheureux qui n’ont jamais senti en eux le moindre chakra et n’osent pas l’avouer, sauf quand ils font un rebirth.

Il y a ceux qui combinent yoga et rebirth, yoga et psychanalyse, yoga et karaté, yoga et poterie, yoga et chasse à courre.

Il y a ceux qui ne cuisinent qu’au ghee, qui mastiquent cent huit fois leurs graines hypercomplètes ou bien qui les avalent le plus vite possible, bon débarras, il y en a qui jeûnent et qui le font savoir, qui se purifient et vous le font sentir, qui craignent plus que tout de se réincarner en cochons. Et puis ceux qui mangent des côtes de bœuf en cachette et s’envoient un coup de rouge en se demandant avec une angoisse délicieuse si cela alourdira leur karma.

C’est que oui-da il y a des obsédés du karma comme il y a des fanas du mûla-bandha, des fondus de l’uddiyâna, des frappés de jâlandhara, des forcenés de la bhastrikâ, de vieux babas enragés de mudrâs, flottant dans le samsâra et dans l’odeur du gañja.

Comme il y a des yoginîs fumeuses de bidis, frétilleuses de la kundalinî, expertes en nauli, friandes de samâdhi, goûteuses d’amaroli, virtuoses en sahajolî, qui se font appeler Shakti lorsqu’elles s’unissent à leur Shiva, le samedi soir après le yoga, pour faire maithuna, yab-yum et youp-la-la.

(Mais il y en a tant d’autres qui voudraient bien savoir à la fin ce que c’est que maithuna, et cela les énerve.)

Oui, et ainsi va le samsarâ, et vive Mâyâ qui n’existe pas, si l’on en croit Gaudapâda, il y a des hommes qui se prennent pour des yogis, il y a des femmes qui se prennent pour des yoginîs, il y a des souris et des hommes, des souris et des yogis, et puis,

Shiva-Pârvatî soient loués, il y a des hommes et des femmes qui ne se prennent pour rien, et que le yoga prend dans ses bras et porte doucement, tendrement, et emporte, vers là-bas, qui déjà est ici, et c’est si beau alors et c’est si simple, le yoga." Pierre Feuga



 

mercredi 24 avril 2013

La grande Voie





                                           
                                           
                                                   
La grande Voie n'est pas difficile,
il suffit d'éviter de choisir.
Si vous êtes libre de la haine et de l'amour,
elle apparaît en toute clarté.

S'en éloigne-t-on de l'épaisseur d'un cheveu,
un gouffre sépare alors le ciel et la terre.
Si vous voulez la trouver,
Ne tentez pas de suivre ni de résister.

La lutte entre le pour et le contre,
voilà la maladie du cœur !
Ne discernant pas le sens profond des choses,
vous vous épuisez en vain à pacifier votre esprit.

Perfection du vaste espace,
il ne manque rien à la Voie, il n'y a rien de superflu.
En recherchant ou en repoussant les choses,
nous ne sommes pas en résonance avec la Voie.

Ne pourchassez pas le monde soumis à la causalité,
ne vous perdez pas non plus dans un vide de phénomènes !
Si l'esprit demeure dans la paix de l'Unique,
cette dualité disparaît d'elle-même.

 À la moindre trace de bien ou de mal,
l'esprit s'embrouille dans les complexités.
En cessant d'agir pour trouver la tranquillité,
celle-ci ne sera qu'un surcroît d'agitation.
Recherchant le mouvement ou le repos,
comment pourrions-nous connaître l'Unique ?

Quand on ne comprend pas la non-dualité de la Voie,
le mouvement et le repos sont faux.
Si vous repoussez le phénomène, il vous engloutit ;
si vous poursuivez le vide, vous lui tournez le dos.

À force de paroles et de spéculations,
nous nous éloignons de la Voie.
Coupant court aux discours et aux réflexions,
il n'est point de lieu où nous ne puissions pénétrer.

Revenir à la racine, c'est retrouver le sens ;
courir après les apparences, c'est s'éloigner de la Source.
Dans l'instant, en retournant notre regard,
nous dépasserons le vide des choses du monde.

Si le monde paraît changer,
c'est à cause de nos vues fausses.
Inutile de rechercher la vérité,
abandonnez seulement les vues fausses.

Ne vous attachez pas aux vues duelles,
veillez à ne pas les
La dualité n'existe que par rapport à l'Unité ;
ne vous attachez pas à l'Unité.
Pour un esprit qui ne fabrique pas,
les dix mille choses sont inoffensives.

Sin Sin Ming

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Poème Zen


 
Le printemps s’en va, cent fleurs se fanent.
Le printemps revient, cent fleurs s’épanouissent.
Devant nos yeux, la roue du temps tourne sans cesse,
Et déjà les cheveux sur nos tempes blanchissent.
Mais ne croyez pas qu’avec le départ du printemps,
Toutes les fleurs sont tombées.
Hier soir encore, devant mon jardin,
J’ai trouvé une branche de pêcher en fleurs.


Man Giac
(Maître zen)
       

mardi 16 avril 2013

L'acceptation . Sando Kaisen
C’est une pratique qui demande beaucoup de lucidité et de présence car elle prend notre égo à rebrousse poil, en lui apprenant à accepter l’inacceptable et à donner ce qu’il refuse de donner.
Elle nous demande d’accepter d’être exposé à l’irritation et à l’indésirable, d’accepter ce à quoi nous dirions habituellement «non».
Mais il s’agit aussi d’accepter intérieurement les côtés obscurs de nous-même que nous n’avons pas envie de reconnaître. Nous devrions accueillir le côté pénible de la situation plutôt que de le refuser et de lutter contre lui. Si, face à une situation pénible, on commence à accepter, sans réagir à priori impulsivement, on introduit une pause dans la situation. Elle est un espace qui permet de mieux la sentir. C’est à partir de cette perception qu’il devient possible d’y répondre plus justement.
En acceptant, on se laisse ainsi pénétrer par la situation à priori inacceptable ou non désirée.
L’inacceptable pénètre jusqu’au plus profond de nous-même. C’est une acceptation sans réserve. Il n’y a pas de «oui, mais...». On est complètement exposé, transparent, et l’on abandonne la lutte et le rejet.
Ensuite, s’accepter soi-même signifie reconnaître sa vraie nature comme étant un «chapelet de mirages» dépourvu de réalité intrinsèque. De se glisser à l’arrière-plan de son être et de regarder cet inacceptable comme n’étant qu’un phénomène dont je ne suis pas l’auteur.
Comme tout phénomène, cet inacceptable a sa propre existence mais je ne suis pas cela.
Percevant cela, l’inacceptable se dissout de lui-même pour ouvrir le champ de la compassion infinie.
Accepter ne signifie pas «subir», mais accepter l’apparition de ce genre de phénomène comme étant une manifestation de la nature même des choses.
Les choses sont ce qu’elles sont mais je ne suis pas ces choses. Se tenant à l’arrière-plan, je peux alors, avec compassion, regarder ces souffrances et ne pas les entretenir, ne pas les nourrir.
Seule l’acceptation totale pourvue de l’Oeil de l’Éveillé met fin au pouvoir du «subir», de «l’endurement» et de la «douleur».

Sando Kaisen

lundi 2 avril 2012

Dharma et Tantra


" Ce sur quoi toutes choses s'assemblent et se dispersent,
Ce sur quoi les Dieux ont leur assise,
C'est Cela dans l'impérissable,
Le suprême firmament...
Ce dont furent emplis l'espace et le ciel et la terre,
Ce par quoi chauffe le soleil,
Par quoi les eaux propagent la vie,
C'est Cela: l'Ordre et la Vérité,
Le Suprême Brahman des prophètes!
Nombril de l'univers,
Cela soutient toutes choses..."
Mahâ-Nirayana-Upanishad

Selon l'Upanishad, l'univers tout entier et toutes ses créatures,
se manifestent depuis une force Mystérieuse
qui les nourrit et en même temps les soutient,
les assemblent et puis les dispersent le moment venu.
Cette assise éternelle, nombril du monde,
transcende l'existence phénoménale et en fait partie intrinsèquement.
Elle se situe au delà et en de ça du perceptible.
Cela est Dieu ou Brahman, dont on ne peut rien dire...

"On ne peut le voir, on ne peut le saisir,
il n'a pas de famille, il est sans yeux,
 ni oreilles, ni mains, ni pieds,
éternel, omniprésent,
il pénètre toutes choses, subtil, inaltérable,
il est Brahman, matrice de toutes choses,
comme le savent les prophètes!"
Mundaka Upanishad

 Brahman, est le mot qui désigne l'absolu.
Cependant il est celui dont rien ne peut être dit...
Il ne peut donc pas être le Créateur du monde!
De ce fait l'univers ne se manifeste que par l'action d'une Déesse,
qui, seule mérite les nom de créatrice, mère et souveraine.
Ceci est l'une des formes les plus profondes et essentielles du Dharma.

"Le Dharma est l'assise de l'univers,
c'est sur lui que le monde se fondent,
et c'est lui que l'on tient pour l'unique point d'appui."
Mahâ-Narayana Upanishad

La mère nature ou grande Déesse,
était reconnue, respectée et honorée dans les temps anciens.
Les Tantrikas connaissaient le Dharma et vivaient selon ses lois.
L'accent était naturellement mis sur les aspects ignorés
par le brahmanisme dogmatique
et les religions s'appuyant sur les seules écritures et rituels.
Le Tantrisme n'est pas philosophie,
mais religion véritable ( religare : relier) et pratiques.
Le mot Tantra, signifie: expansion de la conscience,
 jusqu'à résorption dans l'absolu.
Pour le Tantrika, Shakti est Déesse, énergie pure,
comme Shiva est Divin, conscience pure.
Mayâ, n'est ni illusion et ni non plus magie
elle est le Dharma, 
 Art créateur et harmonie de la nature.
A la fin d'un cycle cosmique,
Shakti, qui n'est autre que la nature,
et Shiva, qui est la conscience présente en son sein,
se dissoudront ensemble dans l'Unique,
qui demeurera pour un temps en sommeil,
avant qu'un nouveau processus de manifestation apparaissent.
La recherche de l'unité originelle,
nous amène à réaliser que la dualité n'existe pas.
le Dharma, Loi divine de l' équilibre universel,
se découvre et se vit par le principe d'analogie sur lequel il repose.
En chaque être cohabite le masculin et le féminin.
Le principe mâle réside dans le coeur de chacun en tant qu'Atman,
Le principe féminin réside à la base de la colonne vertébrale,
en tant que Kundalini-Shakti.
L'Atman n'est autre que Shiva ou Purusha ou pure conscience divine incarnée,
Shakti est Prakriti ou l'énergie pure et divine manifestée,
nous permettant de naître, de grandir,
de nous transformer et de mourir.
Shakti est la puissance de Dieu et
elle est responsable de notre évolution et réalisation spirituelle.
L'unité se manifeste en nous en tant qu'être, conscience et béatitude.
Sat-Chit-Ananda.
C'est le retour à l'absolu et la libération en ce monde.
Chez l'être humain ordinaire et en tout être non réalisé,
la kundalini-Shakti est en demi-sommeil,
on pourrait la comparer à quelques braises rougeoyantes,
justes suffisantes pour assurer le fonctionnement "normal" de l'organisme,
de la naissance jusqu'à la mort.
Cette énergie est pourtant, ne l'oublions pas, la  grande Déesse,
qui meut l'univers tout entier,
fait danser la terre et les planètes dans l'espace,
fait briller le soleil et les étoiles,
assure la vie sur terre de milliards de créatures.
La plupart des personnes ignorent son existence et
dilapident ce potentiel extraordinaire de réalisation et de libération
dans les désirs et les attachements à l'éphémère.
L'intensité de la manifestation divine varie
d'un être humain à un autre selon
qu'il est capable de s'ouvrir et de s'abandonner.
L'élève Tantrika, guidé par l'enseignant ravivera le feu assoupi,
par des pratiques d'accroissement de l'énergie et d'élargissement de la conscience, 
consumant peu à peu tous les désirs mondains ordinaires,
 jusqu'à ce que, dans un dernier désir sublimé,
 la Déesse s'unisse enfin au Divin.
C'est le mariage intérieur ou Moksha, libération,
chanté par les Mystiques et les Saints.
Pour le Tantrika, le désir qui imprègne profondément l'individu,
est la marque même du désir Divin.
Plutôt que de chercher à le réprimer,
il est sublimé et devient l'art sacré de la Shakti!
La représentation Tantrique du divin est celle d'un couple enlacé.
Le Tantrika est à la recherche unique de l'union universelle.
La voie du Tantra est libre, mais ardue,
en raison de son absence de règle stricte,
elle demande une grande force d'âme et un engagement authentique
de l'élève envers l'enseignant et réciproquement.
Il s'agit bien d'une relation intime entre Shiva et shakti,
Où il n'est nulle question d'assouvir ses désirs,
mais de les faire grandir et s'élever jusqu'à la transmutation du plomb en or,
et ainsi de réaliser Dieu sur terre et de vivre dans l'harmonie du Dharma.














  





samedi 3 mars 2012

Chant mystique du tantrisme cachemirien



O esprit, pourquoi t'être intoxiqué
Au vin des croyances,
Plutôt qu'à l'amour véritable?
Pourquoi as-tu vu une réalité dans l'iréel?
Ton absence de vision
M'a propulsée dans un monde d'artifices
Et de mouvements illusoires.

Mille fois j'ai interrogé mon guru:
Quel est le nom de celui qui ne peut être connu?
Encore et encore je l'ai questionné,
Mais en vain.
Seule, j'ai trouvé la réponse:
Le sans nom, l'inconnaissable,
C'est la source de ce que mes sens appréhendent!

Le froid intense peut transformer
L'eau en neige ou en glace.
L'eau se présente ainsi sous trois formes.
Mais éclairé par le soleil de la conscience suprême
Tout se dissout en un substance cosmique.
L'univers animé, l'univers inanimé,
Ne sont autre que Shiva.

La réalité n'est pas atteinte par le contrôle de soi,
Les pratiques ascétiques
et la continence.
Mais par un désir incandescent.
Même après t'être dissout en cette réalité
Comme sel dans l'eau
Il est difficile de baigner dans le Soi.

Le geste quotidien est un rituel
Le mot qui sort de ma bouche,
Le mantra.
Tout ce qui se manifeste en mon corps
Est le signe de cette absolue reconnaissance.
Voici révélé dans sa totalité
Le tantra du suprême Shiva.

Je me suis épuisée à la recherche du Soi.
Qui aurait pu avoir accès à la connaissance
Silencieusement lovée au creux de mon être intime?
Je m'y suis coulée,
Et là, j'ai découvert  les coupes
Débordantes de nectar
Auquelles peu d'êtres portent leur lèvres.

La voie de la connaissance
Est un jardin fertile
Arrose le avec l'eau de l'adoration
Dans la plénitude de l'acte
Alors, peu à peu, tu offres à la Shakti
Les fruits de ce jardin
Ou la liberté surgit de la nudité absolue.

L'esprit humain ne peut trouver satisfaction
Dans le pouvoir, serait-ce celui d'un roi.
Il ne peut trouver satisfaction en renonçant au monde
Mais il la trouve en revenant sans cesse à sa propre source.

Voyageant à travers les étendues de l'absolu,
Moi Lalla, j'ai perdu corps et mental,
Devenue consciente du secret du Soi,
Pour moi, Lalla,
Le lotus a fleuri dans la vase.

Comme le lune allait disparaître
J'ai chanté la folie de mon coeur tourmenté,
Mis à nu par l'amour de Shiva.
J'ai crié; Je cherche la vérité! Je cherche la réalité!
Le rubis du Soi éveillé, je m'y suis absorbée
Et mon corps est de venu le réceptacle du Divin.

J'ai toujours su que mon corps et le Tien
Ne faisait qu'un.
Tu es moi, je suis Toi.
Mais il me reste encore à connaître
La fusion de Ton corps et du mien.
Qui es tu?
Qui suis-je?
Cette union intime, je ne l'ai pas encore vécue.

Celui qui ne voit plus de différence
Entre lui même et l'absolu,
Celui qui ne sépare plus
Lumière intérieure et obscurcissement
Peut développer, dans l'égalité du coeur,
La conscience non duelle.
Lui seul peut voir le Guru des Gurus.

lundi 20 février 2012

Voie directe et voie indirecte

La vérité, la vie, l'unité, l'amour, qui sont en fait une seule et même "chose", sont déjà là en chacun de nous, maintenant et ici, depuis toujours et éternellement.
De ce fait, nous pourrions dire qu'il n'y-a rien à atteindre, pas de voie, aucun cheminement, tout est là dans l'instant présent.
S'il nous est possible de nous ouvrir totalement, sans peur et d'accueillir la vie toute entière, telle qu'elle se présente et se manifeste à chaque instant, dans un "OUI" absolu, sans restriction,
alors il n'y-a rien à faire, juste ÊTRE totalement, avec ce qui EST.
Réaliser cela nous procure la paix et le bonheur que nous cherchons tous consciemment ou inconsciemment dans le monde.
Nous réalisons alors l'impermanence et la vacuité de toutes choses.
Réaliser la vacuité, le vide, c'est réaliser le plein, la plénitude et donc l'unité et l'amour.


L'amour est si simple, c'est la vie qui se révèle à elle même et c'est ce à quoi nous aspirons tous!
Il n'y-a, en fait, rien à faire pour cela, aucun effort, seulement s'abandonner et accueillir ce qui est.
C'est ce qu'on appelle la voie directe, même si ce n'est pas vraiment une voie.
Cependant, pour la plupart, lâcher prise est extrêmement difficile à réaliser, voire impossible!
Nous avons très peur de lâcher "ce à quoi nous tenons, ce que nous connaissons, notre petit "moi" et de sauter dans le vide!
L'inconnu nous terrorise en fait! Nous préférons nous attacher au passé et nous projeter directement dans le futur!
Alors comment pourrions nous apprendre à aimer au présent?...
En fait, c'est impossible.
L'amour est là et il se vit dans l'instant présent ou bien il n'est pas là!
Il n'y-a pas de recettes pour aimer mieux et inconditionnellement.
La clé, c'est le lâcher prise total de l'ego, de tous nos personnages,
tout ce que l'on croit être, tout ce que l'on croit savoir.
Mais l'abandon ne peut se faire par la volonté et ni par la discipline, il est ou il n'est pas.
C'est une illusion de croire aux pratiques pour  mieux s'abandonner et aimer!
"L'amour" resterait alors seulement mental, et aimer ce n'est pas intellectuel!
Il n'y-a donc aucune technique pour aimer.
Aimer, c'est accepter de ne plus s'agripper à rien, de n'être plus personne,
c'est devenir humble, petit et vulnérable...
Comme le disait le grand Maître de l'hiver, Jésus: "Redevenez comme des petits enfants"!
Alors, la vie toute entière s'engouffre en nous, alors "nous entrons dans le royaume des cieux".
L'amour se suffit à lui même, tout le reste devient futile...
C'est pour cette raison, qu'il est dit, que le Bhakti yoga est le plus haut des yogas.
Ce qu'il important de comprendre, c'est que l'unité ou la plénitude de l'être, ne sont pas quelque chose à atteindre dans le futur.
Nous sommes l'unité ici et maintenant ou jamais!

Les pratique spirituelles existent parce qu'il nous est impossible de nous abandonner à la vie,
si nous le pouvions, nous n'en aurions pas besoin!
Toutes les pratiques yogiques nous aident à diriger notre conscience dans le présent.
Les techniques de yoga codifiées permettent, étapes après étapes, d'enlever les voiles de l'ignorance du passé et du futur.
Ces voiles se manifestent sous forme d'obstacles, de peurs, de "carapaces protectrices", de pensées conditionnées, de désirs, d'attachements, d'émotions limitantes et réactionnelles.
La voie codifiée du yoga et selon la tradition Satyananda, se pratique comme suit:

1- Le hatha yoga, ou yoga de l'énergie.
2- Le Raja yoga, ou yoga de la concentration et de la méditation.
3-Le Jnana yoga, ou yoga de la connaissance de soi.
4- Le Bhakti yoga, ou yoga de l'amour ou de l'unité.

Swami Niranjanananda, dit que le Bhakti yoga est la voie de l'émotionnel.
Ce qu'il faut comprendre ici, c'est que nous sommes capable alors d' accueillir pleinement toutes nos réactions émotionnelles et d'en prendre soin, d'aimer ce qui et là, de se pardonner à soi même, de pardonner aux autres, d'avoir de la gratitude pour ce que nous donne la vie...
Ceci est simple, mais ce n'est pas facile du tout à vivre, c'est la plus haute Sadhana!
C'est à ce niveau que nous disons "OUI" inconditionnellement à tout ce que nous sommes.
La vie telle qu'elle se manifeste en nous et autour de nous, n'est plus ni bonne ni mauvaise, elle est ce qu'elle est, au delà de tous nos jugements et limitations mentales.
Avec la pratique codifiée du yoga, nous accédons d'un seul coup à la vérité...
Lorsque le "Qui suis-je? du Jnana yoga se révèle à lui même, du même coup nous réalisons l'unité et baignons dans l'amour et le bonheur originel.


Pour terminer ce texte, voici une petite histoire Zen, que j'aime beaucoup:
Un jour, un Maître Zen dit à ses disciples:
"Vous vous égarez dans la quête du bonheur! Examinez vous, vous même...
Ceux qui reconnaîtront leur sagesse originelle composeront un poème.
Celui qui aura saisi l'essence de mon enseignement recevra la transmission du kesa et du Dharma".
( C'est à dire qu'il deviendra maître à son tour et pourra transmettre les enseignements du Bouddha.)
A cette demande, seul le premier disciple du Maître répondit en écrivant ce poème:
" Mon corps est l'arbre de l'éveil, mon esprit est comme un miroir clair, à chaque instant je m'efforce de le faire briller afin de ne pas laisser la poussière le recouvrir."
(Cela signifie que le corps, dans la posture de méditation, est comme un arbre enraciné, droit et immobile et que l'esprit devient comme un miroir clair. Ce miroir continue de refléter des poussières, pensées, désirs, attachements, apparaissant sans cesse.. La pratique, pour ce disciple, consiste à éliminer la poussière du miroir.)

Pourtant le maître ne transmit pas le kesa, ni le Dharma à son disciple.
Entre temps, le  jeune cuisinier du temple, qui avait entendu parler du poème se dit:
"Ceci n'est pas du tout l'enseignement de notre Maître"!
Comme il était illettré, il demanda à quelqu'un d'écrire ce poème:
"Dans la vacuité, il n'y-a pas d'arbre d'éveil, ni de miroir clair, la nature de Bouddha  est immaculée.
Où y trouverait-on de la poussière"?
Le Maître transmit alors le kesa et le Dharma au jeune moine/cuisinier, qui devint son successeur.

Réaliser le vide essentiel, nous permet d'accueillir la danse de la vie, tous les phénomènes, tout ce qui va et vient, tout ce qui surgit dans notre conscience.
On s'aperçoit alors que les pensées, les désirs, les attachements,
les réactions sont aussi inconsistants que les nuages dans le ciel.
Alors, nous sommes libres... Il est alors inutile de se débarrasser de la poussière.

La voie directe et la voie indirecte ne sont pas opposées, elles sont complémentaires.
Sur la voie indirecte, il existe les pratique codifiées.
Sur la voie directe, c'est l'accueil à chaque instant, qui se suffit à lui même.

lundi 13 février 2012

Hiver et renouveau

L'hiver s'étire, s'étend, s'approfondit,
se cache en la nature, comme la vie qui sommeille pour mieux se trouver.
Il nous invite à aller chercher au coeur de la matière, l'Être qui l'anime.
L'hiver, semblant s'éterniser, nous fait souvent languir de jours nouveaux,
ensoleillés et meilleurs!


C'est pourtant là, au coeur de sa rudesse,
que nous pouvons nous arrêter, nous pauser et nous détendre!
Lorsqu'on a fait le tour plusieurs fois du cycle des saisons,
lorsqu'on sent la vie s'échapper entre nos doigts comme du sable,
lorsque le sol gelé glisse et se dérobe sous nos pas,
lorsqu'on voit lucidement l'instabilité et l'impermanence de toutes choses,
lorsqu'il n'y-a plus rien à quoi s'agripper, rien à saisir...
Alors, en cet instant même,
si nous acceptons de ne pas compenser, 
de ne rien faire, rien attendre,
de ne plus nous laisser prendre par l'illusion, par la distraction,
sans la moindre espérance et en un éclair,
nous pouvons nous abandonner à ne rien être du tout
et réaliser qui nous sommes vraiment,
qui nous avons toujours été et serons éternellement...
Rien du tout et Tout...
Ceci est le message sacré que peut nous révéler l'hiver...
Il nous rend humble et porteur de tous les possibles.
Le signe du Verseau "Aquarius" ou "porteur d'eau",
correspondant à cette période de l'année,
symbolise l'homme réalisé, porteur du nectar de la vie.
Cette eau représente toutes les potentialités du vivant,
mise à disposition de l'être humain.
Rempli de l'ambroisie, de la source de vie,
l'homme est prêt à déverser sur le monde les grâces divines
dont il est désormais investi.
Lorsqu'on réalise ce retournement intérieur total vers lÊtre,
alors la vie peut s'inscrire en nous comme sur une page blanche,
c'est celle du "bateleur" représenté par le signe du Bélier,
l'homme nouveau établi au coeur de lui même
et témoignant de lÊtre dans le monde à la manière qui lui est propre.
L'Être rayonne alors au travers de sa personnalité individuelle incarnée
et ce n'est plus l'ego qui est le maître mais la vie elle même.
L'unité vécu au printemps intérieur
n'est que disponibilité totale à la vie et à sa manifestation créatrice,
il est renouveau et floraison de l' Être
Lorsqu'il reste vécu en surface et de l'extérieur,
il n'est porteur que d'espoir peuplé d'illusions,
dont se repaît inlassablement l'ego.

 L'unique but de toute vie est d'Être et de témoigner de cela sur le terre à notre manière










                                   

jeudi 26 janvier 2012

Dharmata, présentation






Dharmata, signifie celà qui est.
Dans son sens large, le Dharma c'est l'ordre Universel.
Le Dharma constitue l'ensemble des lois naturelles qui soutiennent le monde.

Vivre en accord avec le Dharma constitue la base de toute écologie intérieure et extérieure.
Le Dharma est naturel, il est donc simple. Il s'accompli naturellement à chaque instant, pour peu que nous n'intervenions pas avec notre volonté personnelle, notre égo.

La clé d'un art de vivre en harmonie avec le Dharma est la Vigilance (vigile: mot latin, signifiant éveillé). Vigilance aux sensations, aux pensées, aux émotions qui se soulèvent ainsi qu'à toutes nos actions dans le monde.

Vivre dans le Dharma, c'est être en accord avec ce qui est, l'ordre des choses, le mouvement de la vie d'instant en instant, sans interférer.
C'est aussi permettre à la lumière de l'Attention d'éclairer nos zones d'ombres, de prendre soin de ce qui est divisé et en souffrance et de rétablir l'unité intérieure.
Ceci nous amène à davantage de respect pour nous même, pour les autres et le monde, à une vie plus juste.
Vivre dans le Dharma c'est élargir peu à peu les frontières de l'égo, de manière à réaliser l'unité universelle.

Bien que le Dharma soit la vérité naturelle, nous nous sommes éloignés de notre nature originelle,
en tous cas c'est ce que nous expérimentons, vivant dans la confusion et le désordre.
La méditation constitue la base indispensable à un entraînement au Dharma.
Associé à la pratique formelle, le Dharma englobe toute la vie.
Ainsi nous pouvons pratiquer le Dharma dans toutes nos activités quotidiennes, il suffit d'être pleinement attentif à chaque instant, présent à tout ce qui se manifeste et d'agir de manière ajustée à chaque situation.